vendredi 19 septembre 2008

El Registrador

1. Où le problème surgit.

Afin d’être à la hauteur de notre statut royal, et de façon plus pragmatique, afin de pouvoir contrôler à tout instant les recoins les plus reculés et terriblement lointains de notre nouveau royaume nous décidâmes très vite d’acheter un carro, qu’il ne serait pas faux, vu les proportions du véhicule, de traduire par char.

Comme dans un conte de fée, tout se déroula à merveille, au début. Une famille de concitoyens sur le point de prendre le chemin du retour vers notre contrée natale nous fournit l’occasion de concrétiser notre désir. Le carro était certes un peu grand, mais maintenant nous avions décidé de voir les choses en grand, il ferait donc l’affaire.

Les premières démarches résultèrent d’une simplicité enfantine. Eux, nous, un notaire, et quelques papiers plus loin je me retrouvai à la guide du carro en question. Le tout avait duré environ 20 minutes. Décidément cette contrée ne cessait de nous surprendre, et nous partîmes, moi fier comme tout au volant, ma noble épouse rayonnante à mes côtés et nos descendants confortablement installés à l’arrière, pour une parade triomphale à travers les voies engorgées de la bonne ville de Lima.

Tout était trop beau, et par un matin de juillet un personnage qui allait prendre une importance considérable fit son entrée fracassante dans notre vie : El Registrador. Je découvris en effet en me rendant chez le notaire quelques semaines plus tard pour retirer les papiers définitifs du carro que celui-ci n’avait pas validé la transaction. Motif invoqué : les compatriotes qui nous avaient vendu le carro avaient acheté le même carro avec des documents d’identité (passeports) différents de ceux avec lesquels ils avaient effectué la vente (cartes d’identité péruviennes). El Registrador pubblico demandait donc la présentation des mêmes documents (passeports) afin de vérifier que ces personnes étaient bien elles-mêmes, tout le monde suit ? Pour ceux qui ont des difficultés je vous renvoie à l’exemple ci-dessous.[1]

Nous étions alors le 25 juillet, l’échéance était fixée au 25 septembre ; somme toute la solution ne semblait pas très compliquée : récupérer et produire les mêmes documents ; l’affaire me semblait plutôt simple à résoudre. Là encore, comme souvent, je me trompais.

Il fallut tout d’abord se mettre en contact avec nos compatriotes entre temps rentrés au pays, dans une contrée les plus reculées possibles où aucun moyen de communication moderne n’était en mesure de déranger leur long repos. Après des tentatives répétées et de plus en plus insistantes, un mois plus tard nous parvinrent finalement les tant attendues copies de leur passeport. Je me ruai chez le notaire qui à ma grande surprise ne partagea pas mon enthousiasme : en effet, nos compatriotes – qui commençaient à le devenir de moins en moins – avaient changé de passeport entre le moment de l’achat et le moment de la vente, les numéros de passeport ne correspondaient donc plus…

Par bonheur le notaire connaissait la parade miracle : se rendre chez son collègue qui avait enregistré la vente en son temps et se faire remettre ces satanées copies de passeport. Cependant nous décidâmes comme deux comploteurs de remettre à plus tard cette possibilité et de tenter quand même le coup avec ces copies, après tout El Registrador n’était peut-être pas infaillible. Peine perdue, une semaine plus tard la réponse fatale tombait, et le temps imparti pour résoudre ce qui devenait une mission impossible s’écoulait.

[1] Pierre possède un passeport qui prouve qu’il s’appelle bien Pierre.
Malencontreusement Pierre possède aussi une carte d’identité qui indique également qu’il s’appelle Pierre.
Pour El Registrador Pierre n’est pas Pierre puisque la carte d’identité n’est pas un passeport.

2 commentaires:

The Major a dit…

Joder, la misère. Tu peux toujours conduire ton char ou bien la royale famille doit maintenant utiliser ses royales gambettes pour se déplacer?

Don J. a dit…

La suite aux prochains épisodes Major, c'est loin d'etre fini...