mardi 24 novembre 2009

Piojos

Poux. Et je ne vous dis que ça.

jeudi 19 novembre 2009

Empate

Match nul. Mais alors vraiment nul, et carrément honteux même dans le cas de la France.

lundi 9 novembre 2009

Si loin chez soi

Il y a des gens qui rencontrent des lieux comme ils rencontreraient une personne. Un coup de foudre. De ceux pour lesquels on fout tout en l'air et on suit son instinct, parce qu'on sait que c'est lui, que c'est elle, que c'est là .

Pourtant c'est pas facile au début d'apprendre à vivre ensemble quand rien ne les prédistinait à se rencontrer. Des incompréhensions, le découragement, les illusions s'en vont un peu, l'amour au quotidien remplace le feu de la passion, mais rien n'y change.

On les regarde souvent bizarrement, un peu comme des illuminés. Les gens du lieu ne donnent pas cher de leur resistance, ils s'en iront comme ils sont arrivés, de nulle part. Puis le temps passe, on commence à les considérer, à leur parler, finalement ils sont moins barjots qu'on croyait, ils apportent même du boulot, et des touristes. Alors ils deviennent franchement intéressants, on finit par les adopter et par les appeler par leur prénom.

Moi ils continuent à me fasciner, même longtemps après les avoir rencontrés brièvement. Ils ont traversé le monde pour se sentir chez eux là où ils sont d'ailleurs. Ils ont la grâce de ceux qui ont trouvé, la sérénité de ceux qui savent et l'assurance de leur bonheur contagieux.

Avec La Reine on se dit que ça doit être possible alors, puis on repart.

Jolanda est hollandaise. Un beau jour elle a tout quitté pour venir s'occuper des enfants des rues à Cusco. En quelques années elle a mis sur pied, avec eux, pour eux, 2 des hotels les plus accueillants du nombril du monde, une école, des réfectoires et j'en passe.

Ninos Hotel, Cusco: http://www.ninoshotel.com/

Walter est suisse, un beau jour il a tout quitté pour venir s'installer à Iquitos. Quand Werner Herzog a voulu tourner Fitzcarraldo, c'est à lui qu'il a fait appel pour en être le producteur exécutif. Sans sa débrouillardise, sa connaissance des lieux et des personnes, auxquelles il faut ajouter sa patience pour supporter cet allumé de Klaus Kinski, le film n'aurait jamais pu être fini. Sa maison est un des lieux les plus agréables de la ville, quant à sa piscine, Ze King pourrait vous en parler des heures

La Casa Fitzcarraldo, Iquitos :
http://lacasafitzcarraldo.googlepages.com/

Diana et Wayne sont canadiens, après plusieurs années en Colombie, un beau jour ils ont tout quitté pour venir s'installer à Huaraz, dans la cordillère blanche. Petit à petit ils ont construit un lodge complétement écologique en pleine montagne, là-haut c'est le royaume des chevaux et Principessa en parle encore.

The Lazy Dog inn: www.lazydoginn.com


Charlie est anglais. Un beau jour il a tout quitté pour venir planter sa tente en face du Huascaran, le géant des Andes qui culmine à 6.700 mètres d'altitude. Il est resté 6 mois sur cette lande déserte avec pour seule compagnie ce panorama et une famille miséreuse de campesino. Le temps de se convaincre que c'était là qu'il voulait tenter le coup de construire un hôtel. Quand on voit le lieu, je peux vous garantir que le moins que l'on puisse penser c'est que c'était pas gagné d'avance. Aujourd'hui s'y trouve un des lodges les plus confortables des Andes et Charlie a des idées plein la tête.

Llnaganuco Lodge: www.llanganucolodge.com

lundi 26 octobre 2009

Le cri de la jungle

Iquitos, Amazonie péruvienne. Comme une île, aucune route ne la relie à la civilisation. Perdue au milieu de la végétation, on ne peut y arriver qu'en avion, ou en bateau après des jours de navigation. On est venu voir la jungle, les animaux, les tribus...on tombe sur une ville trépidante de 500.000 habitants, où 50.000 motos-taxis pétaradent à longueur de journée et de nuit, où les magasins placent les amplis sur les trottoirs pour couvrir le bruit de la circulation, où il faut hurler pour parler.

La ville la plus bruyante du monde au milieu du silence. Partout le vert infini strié de longues rainures marron, à toute heure, le cri de la jungle, enfin entendu.

mercredi 7 octobre 2009

Luna

Vitre. Un des premiers mots que j'ai appris en espagnol. Il faut dire que la fâcheuse tendance des chauffeurs de taxi à rouler en toute saison avec les vitres ouvertes vous oblige très vite à maîtriser une phrase du type: "Pouvez-vous fermer la vitre s'il vous plaît?". Les linguistes admettront que cela n'est pas si simple que ça semble et qu'une telle phrase recèle en fait d'apprentissages lexicaux, morpho-syntaxiques et pragmatiques de haute volée. Essayez avec le polonais ou le bosniaque par exemple.

Si j'y repense c'est parce que j'ai davantage pris le taxi ces derniers jours et je balance dorénavant ma phrase comme une routine tout en fermant machinalement la sécurité des portières.

Si j'y repense aujourd'hui c'est parce que maintenant je sais que c'est également un très beau prénom, de ceux que les Péruviens n'utilisent plus et qu'avec La Reine nous nous défendons de vouloir utiliser un jour.

Si j'y repense c'est aussi que je vais bientôt revoir la lune, la vraie, avec les étoiles et le ciel. On quitte Lima pour quelques jours. A ce qu'il paraît on peut observer une grosse boule de feu dans le ciel à Trujillo et nous sommes curieux de cet étrange phénomène astronomique qui ne se manifeste plus ici depuis 6 mois.

Si j'y repense c'est parce qu'en ce moment Objectif lune est devenu la dernière obsession tintinophile de Ze King.

Si j'y repense c'est parce que depuis un beau jour à Côme, Le Cantique des Créatures, San Francesco et Mirò m'ont fait ressentir une émotion étrange malgré mon incompétence ontologique pour la foi. Ou peut-être à cause d'elle.

Et puis sinon, j'ai toujours été un peu dans la lune, un espace comode qui permet de voyager à moindre frais.

Laudato sii, o mio Signore,
per tutte le creature,
specialmente per messer Frate Sole,
il quale porta il giorno che ci illumina
ed esso è bello e raggiante con grande splendore:
di te, Altissimo, porta significazione.

Laudato sii, o mio Signore,
per sora Luna e le Stelle:
in cielo le hai formate
limpide, belle e preziose.



Laudato sii, o mio Signore, per frate Vento e
per l'Aria, le Nuvole, il Cielo sereno ed ogni tempo
per il quale alle tue creature dai sostentamento.

Laudato sii, o mio Signore, per sora Acqua,
la quale è molto utile, umile, preziosa e casta.



Laudato sii, o mio Signore, per frate Fuoco,
con il quale ci illumini la notte:
ed esso è robusto, bello, forte e giocondo.

Laudato sii, o mio Signore, per nostra Madre Terra,
la quale ci sostenta e governa e
produce diversi frutti con coloriti fiori ed erba.

vendredi 25 septembre 2009

Nombre

Nom en général ou prénom plus spécifiquement. A ne pas confondre avec nombre qui se dit numero. Même si au Pérou les prénoms sont parfois un sacré spectacle. La législation est plutôt permissive en la matière, ce qui associé à l’ignorance vous autorise à appeler votre enfant Caracas ou Hitler. Bien sûr ces exemples sont rares et sortent sur la presse, faisant marrer tout le monde au lieu de s’interroger sur une éventuelle réforme sur le sujet.

Si la tradition espagnole et quechua regorgent de prénoms plutôt mignons, les choix parentaux semblent cependant s’orienter vers des options plus exotiques et euphoniques caractérisées par une propension notable à la déformation orthographique. Toutes sortes de variantes s’affichent à l’arrière des taxis et des combis en de touchantes dédicaces des chauffeurs à leur progéniture et les longs embouteillages matinaux me donnent l’occasion de curieuses découvertes phonologiques.

Plusieurs tendances existent mais celle américaine semble attirer le plus de suffrages. Voici, à titre d’exemples quelques idées qui pourraient se révéler précieuses pour des parents désemparés : Jackline , Estephanny , Jhon, Emilith, Perl, Kiara. Le courant messianique est également assez bien représenté. Lointain rayonnement de son aura, Jean Paul II aura ainsi légué une génération de Jean au Pérou. Curieusement ce prénom y est rarement transcrit sous cette forme mais avec d’innombrables variantes qui comportent toutes la curieuse exigence du H comme trace, sans doute, d’un supplément de grâce attaché à sa provenance céleste: Jhean, Jeanh. Parfois cela culmine en l’apothéose d’un Jhean Paulo mêlant sans scrupule langues, sons, immanence et transcendance.

Depuis quelques temps une préoccupation me trotte dans la tête. Partout où nous allons des femmes s’approchent de Principessa, caressent ses cheveux, émerveillées, et demandent comment elle s’appelle. Elles font répéter plusieurs fois, puis se le répètent pour elles-mêmes. Au début je trouvais ça touchant, maintenant je commence à me demander si nous ne sommes pas en train de laisser partout dans les Andes les traces d’un étrange prénom aux graphies improbables, qui trônera bientôt à l’arrière des taxis, attirant le regard curieux d’un touriste de passage.

vendredi 11 septembre 2009

VRAE

Valle de los rios Apúrimac y Ene. On utilise peu de sigles au Pérou, les surnoms y sont beaucoup plus fréquents pour désigner aussi bien les personnes, les lieux que les administrations. Pourtant celui-ci est un des rares qui occupe en permanence les débats politiques et journalistiques ces derniers temps. C’est que pour une fois le Pérou est premier. Toutes les statistiques et études internationales viennent en effet de consacrer le Pérou comme premier producteur mondial de cocaïne. La lutte est serrée avec la Colombie qui conserve le titre de premier exportateur mondial, mais de peu, et vu l’inertie politique locale il y a fort à parier que le Pérou remportera cette nouvelle couronne la saison prochaine.

Cette victoire, le Pérou la doit essentiellement à une région difficile d’accès dans la sierra centrale, sur le versant amazonien : la Valle de los rios Apúrimac y Ene précisément qui a su en quelques années devenir la région du monde avec la plus forte production de feuille de coca par Km2. Il faut tout de même avouer que cette zone n’a pas eu a faire trop d’efforts, elle cumulait scandaleusement tous les avantages : climat parfait pour la culture de la coca, isolement géographique, abandon total des pouvoirs publics, abri des derniers senderistes, taux de pauvreté et d’analphabétisme record et désintérêt général pour le destin de ses habitants. Avec autant de facilités, triompher n'a aucun mérite vraiment. Ainsi, pendant que les Américains concentraient tous leurs efforts en Colombie, le VRAE travaillait avec discrétion pour porter enfin le Pérou sous le feu des projecteurs, à la place qu’il mérite de l’avis de tous ses dirigeants: la première. Sauf que maintenant qu’ils sont premiers, ils ne sont plus contents du résultat les dirigeants, faudrait quand même savoir ce qu’ils veulent.

Education, cultures alternatives, militarisation, pacte éthique, les mots virevoltent mais personne ne sait vraiment quoi faire pour endiguer le phénomène. La zone échappe complètement au contrôle de l’état, elle est devenue le repère de ceux qu’on appellent ici les narco-terroristes, anciens de Sendero Luminoso reconvertis dans le trafic juteux de drogue avec un vague idéal marxiste pour couverture. La région est sous leur contrôle, mafias colombiennes y mexicaines y font leur marché, on hésite à déplier l’armée pour ne pas réveiller les démons des années 80 et le spectre d’une radicalisation de la violence "à la mexicaine" terrifie tout le monde. Le mot conflit est tabou, pourtant plus de 50 militaires et policiers y sont morts en un an et un hélicoptère y a été abattu ces derniers jours.

Bien sûr le Pérou n’est pas la Colombie et la chronique de Lima n’a rien à voir avec celle de Ciudad Juarez ; comme toujours, la capitale est bien loin de tout ça mais il n’en reste pas moins que le VRAE a fait accéder le Pérou à la notoriété internationale et pour une fois, personne n’en est fier.

Heureusement la semaine dernière une nouvelle victoire est venue redorer le blason du pays : le Pérou est en tête du classement mondial pour la falsification des dollars américains.