lundi 29 juin 2009

Jonas Brothers


Qui sont-ils? Un groupe musical composé d'un trio de frères américains illuminés par la grâce évangeliste. Que font-ils? Une musique insipide, inodore, incolore qui rend hystériques les jeunes filles de tous horizons. Où sont-ils? A l'hôtel Marriott, juste derrière chez moi.

Jusqu'à il y a quelques jours je vivais heureux sans suspecter l'entrée fracassante de ces gentils garçons dans ma vie. Et puis un beau matin nous avons été réveillés avec La Reine par des hurlements et des acclamations. Nous nous sommes interrogés : une classe en sortie scolaire? Pour voir la mer? Difficile à imaginer...La célébration d'un anniversaire? Les Péruviens en raffolent, mais à 7.00 du matin difficile à imaginer...Une manifestation? Probable par les temps qui courent mais difficilement imaginable dans notre quartier-vitrine de Lima. Tout simplement les Jonas Brothers débarqués dans la nuit au Marriott et acclamés par des dizaines de fans dès l'aube. Tout ça je ne l'ai compris que plus tard dans la matinée, quand les groupies étaient devenues tellement nombreuses qu'elles gênaient la circulation et les hurlements avaient pris une telle intensité qu'ils donnaient l'impression de vivre en permanence sur les tribunes d'un stade. Je me suis risqué dans la rue jusqu'au premier policier pour éclaircir ce mystère. Celui-ci m'a bafouillé un nom que je lui ai fait répété 3 fois avant de céder devant son regard incrédule dans lequel se lisait tout son mépris pour le pauvre arriéré que j'étais. Je m'en allais penaud sous le poids de mon ignorance lorsque par chance j'aperçus une voiture décorée à l'effigie des 3 frères dont je pus enfin découvrir l'identité et les visages angéliques.

A ce moment de ma découverte je ne me doutais pas que cela ne faisait que commencer. Pendant 3 jours des jeunes filles pré-pubères assiégèrent l'hôtel. En effet, les 3 garçons en question n'ont rien trouvé de mieux pour faire parler d'eux que de se faire passer pour des saints: ils ne boivent pas, ne fument pas et ne baisent pas en témoignage de leur foi d'illuminés, ce qui a aussi le mérite publicitaire de bien plaire aux jeunes filles. Par contre ils emmerdent beaucoup tous les voisins des hôtels où ils résident et ça je ne sais pas si le bon Dieu est prêt à le leur pardonner.

Nous avons vu passer Georges Bush, l'équipe d'Argentine et Miguel Bosé, mais jamais cela n'avait entraîné des débordements et des scénes d'hystérie collectives telles que celles qui se sont déroulées pour eux. Les filles étaient là dès les premières heures du jour, entonant des coeurs sirupeux et scandant leur nom à longueur de journée. La sortie d'un quelconque client de l'hôtel (dans la mesure où ce statut est possible au Marriott) donnait lieu à des poussées hystériques pouvant atteindre des aigus étonnants. Pour des raisons indéterminées et à un rythme régulier des courses folles se déclenchaient autour de l'hôtel, tout le monde se bousculait, traversait l'avenue qui sépare l'hôtel de la mer au risque de se faire renverser pour constater qu'il n'y avait rien d'autre à voir qu'une employée terrorisée qui finissait son service sous les hourras, alors de frustration ils entamaient un petit refrain puis quelques instants plus tard la même scène recommançait à un autre angle de l'hôtel.

Au début tout cela m'amusait. Les jours suivants un peu moins, et quand au matin du troisième jour les frères Jonas s'en sont repartis, j'étais tout seul à ma fenêtre pour leur souhaiter de rencontrer une grosse baleine sur leur trajet.

samedi 20 juin 2009

Caballero

Monsieur. Ça me prend toujours au dépourvu, et lorsque c'est une jeune fille qui m'interpelle de la sorte, j'ai toutes les peines du monde à empêcher mon cheval de ruer pour courir vers l'aventure au galop.

mardi 16 juin 2009

Indiana Jones et le mystère des Lignes Mystérieuses

Même si je ne vais plus guère au cinéma pour les raisons expliquées précedemment, il m'est arrivé à l'occasion de ma première sortie en ces lieux à Lima d'assister à la projection de la bande-annonce du dernier Indiana Jones. On y voyait un avion survolant dans une lumière orangée et sur une musique épique les mystérieuses lignes de Nazca. C'était superbe, le National geographic n'aurait pas fait mieux. Dans un coin de ma tête, je m'étais alors dit, moi aussi je peux faire ça Indiana Jones. Eh bien voilà, maintenant je l'ai fait, et je peux vous dire que ça ne ressemble pas tellement à un film de Spielberg.
Tout d'abord il faut y aller à Nazca. En soi ce n'est pas très compliqué, il suffit de prendre la seule route en direction du sud, à travers le désert, la Panamericana sud. Comme c'est la seule route justement, on est pas les seuls à y circuler et étant donné que le Pérou a le triste record du nombre de morts sur les routes en Amérique du sud, autant dire qu'on conduit un peu tendu entre les camions en direction du Chili ou de l'Equateur et dont les chauffeurs ont dû dormir quelques heures la semaine précédente. Ainsi il peut arriver de croiser un semi-remorque en équilibre sur le bord d'une falaise après un virage raté ou d'assister au vol plané d'une moto suite à l'arrêt intempestif d'un taxi collectif, autant d'événements qui brisent la monotonie du voyage. Sur les bas-côtés de petits autels à la mémoire des victimes rythment le trajet, un peu à la manière des bornes kilométriques en Europe. Parfois ces constructions sont regroupées en petites communautés et rappellent étrangement le village des Schtroumpfs, on se dit alors que quelque part certains doivent toujours attendre l'arrivée des leurs et d'un autobus. Les kilomètres et les tombes se succèdent, derrière nous les morts hantent le désert de leur destin brisé, dans la solitude sidérale des lignes droites infinies qui rendent encore plus absurdes l'idée même d'accident.

Finalement après 6 heures de route on arrive à Nazca. Rencontrer un bar ouvert sur la lune produirait sans doute la même impression. Les paysages traversés jusque là ont lentement annihilés l'idée de civilisation, certes les quelques villages poussiéreux autour de rios asséchés traversés les heures précédentes et dignes des meilleurs westerns maintenaient l'illusion, mais on est tout étonné de retrouver l'agitation caractéristique et pétaradante des villes péruviennes.
L'attraction de la ville c'est bien sûr les lignes tracées dans le désert par les Nazca, une étrange peuplade pré-inca qui avait la mauvaise habitude d'utiliser comme porte-clés les têtes momifiées des ses ennemis. Ces lignes qui résistent au temps et dont personne n'a pu percer le secret, même pas Indiana Jones, font converger en ce lieu perdu Américains déguenillés et Japonais masqués. Ceux-ci rôdent par la ville et sont la proie d'énergumènes, sortes de Looping échappés de L'Agence Tous Risques à la solde de compagnies aériennes aux noms improbables, car ces fameuses lignes, il n'y a que du ciel qu'on peut les admirer. Toute la question qui agite donc l'Internationale des touristes est de savoir dans quel avion monter. Le choix a son importance vu que dans l'année écoulée un avion transportant des touristes français s'est écrasé et un autre a fait un atterrissage miraculeux en catastrophe. En outre, le contexte du crash de l'airbus d'Air France ne facilite pas la décision.
Finalement nous nous décidons avec La Reine pour tenter le coup auprès d'une compagnie recommandée comme ayant les meilleures garanties. Les arguments de vente sont en effet des plus convaincants: nous ne mélangeons pas notre essence et nous venons vous chercher à votre hôtel. Heureusement Ze King n'a pas l'intention de faire l'expérience et j'échappe à une discussion compliquée: les dessins des lignes sont partout dans la ville, et on les voit très bien de là où il est, pourquoi donc se compliquer la vie tranche-t-il avec sagesse pour masquer son peu d'enthousiasme à monter dans ces coucous dont il nous entend discuter les mérites depuis un moment.
Le lendemain on vient effectivement nous chercher à l'hôtel alors que nous finissons de dévorer un copieux petit-déjeuner au mépris des conseils qui recommandent de ne rien manger pour éviter d'être malade car l''avion bascule sans cesse de droite à gauche pour faire voir les lignes à l'ensemble des passagers. Direction l'aérodrome. Un film est prévu pour mettre dans l'ambiance mystique, les couleurs éculées de la vidéo n'ont rien à envier à la bande-annonce d'Indiana Jones. Mais je n'ai pas le temps de voir la fin, on m'appelle, c'est mon tour. Je jette un dernier regard sur La Reine et les enfants et je me dirige vers la piste comme si j'allais sauter sur Dien Bien Phu dans les heures qui suivent. Du coté de l'aérodrome on se retrouve soudain plongé dans l'ambiance des Têtes brûlées: agitation des mécanos et vombrissements incessants qui empêchent de parler. Pappy Boyington m'attend souriant derrière son cockpit, juste le temps de m'apercevoir que je suis entouré de Français et je me retrouve avec un casque sur les oreilles dont j'ignore toujours à l'heure qu'il est l'utilité puisque le pilote communique avec des signes qui me semblent totalement déplacés, rappelant ceux des plongeurs sous-marins.
Soudain c'est magique, les lignes sont là, dessous, certaines, comme tirées à la règle taillent le désert et se perdent à l'horizon, d'autres dessinent des figures émouvantes: un singe, des mains, une baleine... L'avion bascule à droite, puis à gauche, puis à droite, je me dis qu'avec un peu de lumière orange et une musique épique ça aurait sûrement une autre gueule mais je suis heureux quand même, un dernier virage à gauche, c'est tellement beau que je manque de vomir. Un épisode sans doute coupé au montage dans Indiana Jones.